OphtalmoLaus: un projet « colaussal »
Focus sur les liens entre maladies cardiovasculaires, mentales et oculaires.
Rencontre avec le Dr Peter Vollenweider, médecin-chef du service de médecine interne du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) et co-investigateur principal de la cohorte CoLaus/PsyCoLaus, et la Dre ès sc. Ciara Bergin, co-investigatrice de la sous-étude OphtalmoLaus à l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin.
Comment est né ce projet sans précédent en Suisse, baptisé CoLaus/PsyCoLaus?
Dr Peter Vollenweider (P.V.) : L’étude CoLaus/PsyCoLaus a débuté en 2003 en bénéficiant d’un soutien du Fonds national suisse. L’idée à l’origine était d’identifier les liens pouvant exister entre les facteurs de risque des maladies cardiovasculaires et les pathologies mentales ainsi que psychiatriques. Pour cela, nous avons sélectionné un échantillon représentatif de la population lausannoise à qui nous proposons donc, tous les quatre à cinq ans, des examens cardiovasculaires et psychiatriques. Cette étude de cohorte sur le long terme s’est alors avérée extrêmement fructueuse et a abouti à quelque 600 publications scientifiques.
Elle s’est ensuite étendue à d’autres domaines, notamment l’ophtalmologie avec OphtalmoLaus. Quel est l’intérêt de cette déclinaison?
Dre Ciara Bergin (C.B.) : À l’Hôpital ophtalmique, le Dr Lazaros Konstantinidis, le Dr Bao-Khanh Tran, Edwige Forestier et moi-même avons démarré cette sous-étude en 2015, en proposant aux patients et patientes de la cohorte un examen clinique ainsi qu’une collecte d’images oculaires. Nous mesurons la pression intraoculaire et l’épaisseur de la cornée, examinons la qualité de la vision et réalisons des images du fond de l’œil. L’objectif est de pouvoir analyser ces paramètres et de les croiser avec les informations récoltées par CoLaus/PsyCoLaus et ses sous-études pour identifier d’éventuels indicateurs du développement d’une maladie oculaire, mentale ou cardiovasculaire.
P.V. : On sait en effet que le fond de l’œil est un bon reflet de ce qui se passe dans les vaisseaux. C’est la richesse de ces différentes sous-études qui fait de CoLaus/PsyCoLaus une cohorte unique et la base d’une collaboration vertueuse, notamment avec le CHUV et l’Université de Lausanne.
Des résultats ont-ils déjà pu être obtenus à partir de la cohorte OphtalmoLaus ?
C.B. : Oui, le premier article publié à partir de ces informations a mis en avant la relation entre une distorsion des vaisseaux de l’œil et les modifications des muscles cardiovasculaires. Mais cela demande énormément de temps de récolter suffisamment de données pour les analyser. Nous comptons aujourd’hui plus de 1700 personnes participantes.
Avez-vous été confrontés à des difficultés lors de la mise en place de ces cohortes ?
P.V. : À l’origine de CoLaus/PsyCoLaus, nous avions la crainte d’une réticence des participants et participantes à donner du matériel génétique pour ces analyses. Mais elle a été levée face à la mise en place d’une solide procédure d’information et de sécurité des données.
Nous craignions également que les personnes se lassent d’être sollicitées pour les suivis réguliers et les différentes sous-études, mais finalement nous pouvons compter sur un noyau fidèle de patients et patientes qui apprécient de bénéficier d’informations pertinentes pour leur état de santé.
C.B. : Pour ce qui est d’OphtalmoLaus, la période Covid a engendré une certaine difficulté à faire revenir les participants et participantes à l’hôpital. Nous avons déplacé les consultations dans notre centre de la gare de Lausanne pour réaliser les examens rapidement, dans un lieu plus facilement accessible.
Pour en savoir plus : www.colaus-psycolaus.ch/autres-etudes/ophtalmolaus/
Nous avons modifié l’article original pour en faire une version web.