Un catalogue de plus de 33’000 livres
Reportage à la Bibliothèque sonore romande (BSR).
Dans le quartier du Flon à Lausanne se trouve cette bibliothèque atypique où auditeurs et auditrices n’ont même pas besoin de se rendre. Tous les ouvrages sont téléchargeables ou envoyés par la poste sur un CD.
Lire est un loisir qui n’est pas accessible à tout le monde. Les personnes dont la vue est fortement diminuée ou qui sont aveugles ont un accès difficile ou impossible à la lecture. Tout comme celles qui souffrent de dyslexie ou d’autres troubles ne leur permettant pas de se plonger dans un livre. La Bibliothèque sonore romande (BSR) est née dans le but de permettre à toutes et tous d’écouter, à défaut de lire, un vaste choix de livres. « Elle a vu le jour en 1976 de la volonté de la journaliste Madeleine Bernet, qui était également guide de ski pour personnes malvoyantes. Elle voulait vraiment que le contenu des dernières sorties littéraires puisse profiter également à une population qui n’y avait pas accès jusque-là », explique Isabelle Albanese, directrice de la BSR.
Des titres très variés
Pari réussi, car pas moins de 3500 auditeurs et auditrices empruntent régulièrement des ouvrages audios. « Nous avons beaucoup de personnes âgées, mais aussi plus de 50 % de personnes dyslexiques. Notre catalogue est composé de titres très variés : romans, documentaires, livres jeunesse, de cuisine ou de développement personnel, entre autres. Nous souhaitons proposer à nos auditeurs un panel d’ouvrages dont on parle actuellement : les prix Goncourt, les best-sellers, etc. Nous ne voulons pas rester cloisonnés aux grands classiques de la littérature. Nos auditeurs et auditrices ont les mêmes goûts que tout le monde ! », précise la directrice.
Sur le bureau du bibliothécaire traîne par exemple le livre du spationaute Thomas Pesquet, muni d’un post-it rose qui indique « demande d’un auditeur ». Il fait donc partie des enregistrements prioritaires à réaliser.
«Nous faisons tout nous-mêmes»
Pour fonctionner, la BSR emploie onze personnes à temps partiel : plusieurs informaticiens, un bibliothécaire, une agente en information documentaire, un responsable de la production, entre autres. Ses vastes locaux de 540 m2 disposent de trois cabines d’enregistrement, d’un vaste lieu de stockage de CD, d’un coin pour la tenue des cafés littéraires (six sont organisés chaque année), ainsi que d’un graveur à CD et d’une machine qui permet d’imprimer des étiquettes en braille. « Nous faisons tout nous-mêmes. Les bénévoles peuvent venir enregistrer en cabine ou le faire depuis leur domicile. Ensuite, nous nous occupons d’ajouter les titres au catalogue en ligne, gravons les CD puis les envoyons gratuitement en courrier A partout dans le monde. Une grande partie de nos lecteurs et lectrices âgées ne maîtrisent pas les outils numériques et préfèrent donc avoir un support audio sur CD », explique Isabelle Albanese.
« Nous souhaitons proposer à nos auditeurs et auditrices un panel d’ouvrages dont on parle actuellement »
Isabelle Albanese
Le matin de notre visite, Jeanne*, retraitée dynamique et souriante, était en train d’enregistrer un livre. Elle fait partie des 120 bénévoles qui prêtent leur voix à la littérature. « Nous avons une majorité de femmes à la retraite, mais aussi quelques hommes, souvent d’anciens professeurs. Nous leur demandons de faire de la transcription audio et non pas d’interpréter le texte comme pourrait le faire Fanny Ardant ! », précise Isabelle Albanese.
* Prénom d’emprunt.
Casting des bénévoles à la Bibliothèque sonore romande
Devenir lecteur ou lectrice bénévole n’est pas une mince affaire. Chaque personne passe d’abord un casting. « Dix nouvelles personnes se proposent chaque mois et nous n’en gardons que deux. Il faut non seulement être à l’aise avec la lecture, mais aussi avec la technique », continue la directrice. Une formation individuelle est ensuite proposée à chaque bénévole qui a passé le casting avec succès. Elle dure environ deux heures. Puis, la personne peut enregistrer son premier ouvrage, soit dans les locaux de la BSR, soit chez elle à l’aide d’un logiciel spécifique. « Pour une heure d’écoute finalisée, il faut compter environ trois heures de travail. Tout doit être lu : les notes de bas de page, la table des matières, les remerciements. Le découpage du livre avant de l’enregistrer est une phase parfois compliquée et qui prend du temps », explique Isabelle Albanese.
Des catalogues numérique et papier
Une fois l’ouvrage transcrit, il est alors mis à disposition sur les catalogues numérique et papier. Les auditeurs et auditrices peuvent emprunter un nombre illimité d’ouvrages et tout cela est entièrement gratuit. «Le seul prérequis pour qu’une personne puisse emprunter à la BSR est qu’elle fournisse une attestation d’un ou une professionnelle de la santé qui stipule qu’elle a de la difficulté à lire un texte imprimé. Les inscriptions peuvent se faire en ligne, par téléphone ou directement dans nos locaux. Nous portons une grande attention à ce que tout le monde puisse facilement avoir accès à la BSR, quelles que soient ses connaissances en informatique !»
En chiffres
- 480’000 francs par an est la part du budget de la BSR qui est couverte par l’Office fédéral des assurances sociales, soit environ 50 %. Le reste des fonds provient des cantons romands, de dons privés et de fondations.
- 33’000 livres constituent la collection mise à disposition par la BSR qui collabore avec d’autres bibliothèques sonores francophones.
- 6’000 heures de son sont enregistrées par des bénévoles de la BSR chaque année, ce qui correspond à 800 nouveaux livres.
- 65’000 livres audio sont empruntés chaque année par les auditeurs et auditrices de la BSR.
Nous avons modifié l’article original pour en faire une version web.