Ces auras qui accompagnent la migraine
Visuelles, sensitives ou motrices, elles se manifestent lors de maux de tête.
Rencontre avec la Prof. Aki Kawasaki, médecin-adjointe au service de neuro-ophtalmologie de l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin, et le Dr Leonardo Caranzano, chef de clinique adjoint dans l’Unité de céphalées du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV).
Qu’est-ce qu’une migraine avec aura ?
Prof. Aki Kawasaki (A.K.) : Les migraines se caractérisent par des céphalées, ces maux de tête intenses qui sont typiquement unilatéraux, transitoires et pulsatiles. Certaines d’entre elles sont précédées ou accompagnées d’une aura, un trouble neurologique réversible.
Comment se manifeste les migraines avec aura ?
Dr Leonardo Caranzano (L.C.) : Les plus fréquentes d’entre elles, les auras visuelles, se manifestent par des scintillements qui bougent dans le champ visuel. Elles s’accompagnent parfois d’une perte de la vision à l’endroit où se trouvait l’aura. Mais il en existe d’autres types, comme les auras sensitives, caractérisées par des fourmillements – souvent dans une même partie du corps (le visage ou le bras par exemple) et d’un seul côté. Elles peuvent être suivies par une perte de sensibilité dans la zone en question. Certaines se manifestent de façon plus inquiétante. C’est le cas des auras aphasiques, qui rendent incapable de parler, et des auras motrices, lors desquelles la personne perd sa force et reste temporairement paralysée d’un côté du corps.
Qu’est-ce qui les déclenche ?
A.K. Des facteurs extérieurs peuvent les déclencher, comme le stress, le manque de nourriture, un changement du rythme du sommeil, etc. Les auras résultent de ce que l’on nomme une « onde de dépression neuronale ». Elle se propage lentement à travers le cortex cérébral. Lorsque l’onde s’éteint, les symptômes de l’aura se dissipent.
Comment les traite-t-on ?
L.C. Ce ne sont pas les auras que l’on traite, mais la céphalée. Les traitements pharmacologiques se divisent en deux catégories : ceux dits « de crise », qui visent à arrêter les maux de tête, et ceux dits « de fond », destinés à réduire la fréquence et l’intensité des crises, sans forcément les faire disparaître complètement. Pour calmer les maux de tête, on utilise du paracétamol ou des anti-inflammatoires non stéroïdiens et, si cela ne suffit pas, des triptans. Toutefois, d’autres classes de médicaments, déjà autorisées par Swissmedic, devraient être disponibles bientôt. Il s’agit de gépants et de ditans, qui inhibent des molécules nommées CGRP (Calcitonine Gene-Related Peptide ou peptide relié au gène de la calcitonine, ndlr) libérées dans le cerveau lors des crises de migraine. Ils sont déjà utilisés aux États-Unis et sont prometteurs.
A.K. C’est un véritable espoir pour le traitement de la migraine, d’autant que ces gépants et ditans devraient aussi soulager les symptômes accompagnant la céphalée, comme la photophobie ou les nausées.
Qu’en est-il des traitements de fond ?
L.C. Nous avons recours à des antiépileptiques, des bêtabloquants et des antidépresseurs. Depuis quelques années, nous disposons aussi, pour les traitements de fond, de médicaments (des anticorps anti-CGRP injectables) qui sont très efficaces chez un nombre considérable de personnes. En outre, nous devrions bientôt voir apparaître sur le marché des gépants pouvant être utilisés à la fois comme traitement de crise et de fond. Mais il n’y a pas que les médicaments. Il est aussi très important de faire régulièrement de l’activité physique et de gérer son stress avec des techniques de relaxation. Les personnes concernées peuvent aussi apprendre à faire de l’autohypnose au moment où elles sentent que la céphalée va arriver ou recourir à l’acuponcture.
Quelles sont les recherches en cours ?
L.C. L’une des pistes explorées cherche à prévenir les crises de migraine, par exemple en prescrivant le traitement non pas pendant l’attaque, mais avant qu’elle se déclenche.
Certaines migraines sont procédées ou accompagnées d’une aura, un trouble neurologique réversible
Prof. Aki Kawasaki
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