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Illustration d'une opération avec intelligence artificielle, une des innovations en ophtalmologie
Bienvu!

Ophtalmologie 2.0

Temps de lecture: 6' Posté le Par Laetitia Grimaldi

Ces innovations en ophtalmologie 2.0 en passe de transformer les soins de demain.

Depuis une vingtaine d’années, les progrès que connaissent les innovations en ophtalmologie sont incessants. Lasers, injections oculaires, premiers implants ont révolutionné la prise en charge de pathologies comme la myopie ou la cataracte. La suite, elle, s’annonce spectaculaire. Intelligence artificielle, implants rétiniens high-tech ou encore thérapie génique se préparent. Et l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin est sur tous les fronts. Coup de projecteur sur ce qui nous attend en ophtalmologie 2.0.

Les experts sont unanimes : tout s’accélère aujourd’hui dans le domaine de l’ophtalmologie. Du diagnostic aux traitements en passant par l’avènement d’outils permettant aux non-voyants de retrouver des parcelles d’autonomie, les progrès sont fulgurants. Et vont s’intensifier. De là à parler de révolution ? En partie, évidemment, mais l’histoire est plus subtile que cela.
« En médecine, il y a bien sûr des révolutions qui changent radicalement les regards et les approches, mais dans la majorité des cas, elles ne surviennent véritablement que tous les vingt ou trente ans, souligne le Prof. Thomas J. Wolfensberger, directeur médical de l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin. Le reste du temps, les progrès s’apparentent à du fine-tuning, autrement dit, à un perfectionnement continuel de ce qui existe déjà : les machines se dotent de nouvelles fonctions, les outils se miniaturisent, les traitements se personnalisent. L’ophtalmologie n’échappe pas à cette logique et c’est tant mieux ! »

Thomas Wolfensberger, directeur médical de l'Hôpital ophtalmique Jules-Gonin
Prof. Thomas J. Wolfensberger

directeur médical de l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin

Intelligence artificielle : une des innovations en ophtalmologie 2.0

Plus de quarante ans après l’arrivée des lasers ayant métamorphosé la prise en charge des troubles réfractifs (myopie, astigmatisme, etc.), puis des injections intraoculaires désormais utilisées pour le traitement de pathologies de la rétine, nous serions bel et bien à l’aune d’un nouveau chapitre. L’un de ses points d’orgue : l’intelligence artificielle.
« Nous en expérimentons les prémices et elle va s’imposer, c’est une évidence », affirme la Dre Irmela Mantel, coresponsable de l’unité de rétine médicale à l’Hôpital ophtalmique. Est-ce une bonne chose ? « Oui, si nous parvenons à accompagner ce changement dans sa globalité, estime l’experte. L’intelligence artificielle se profile comme un soutien inouï face à la complexité des images médicales produites aujourd’hui. L’idée n’est pas que des algorithmes supplantent le soignant, mais qu’ils en soient un allié puissant pour lui permettre d’endosser de nouveaux défis. Et ceux-ci ne manquent pas en ophtalmologie. »

Dre Irmela Mantel, coresponsable de l'unité de rétine médicale
Dre Irmela Mantel

coresponsable de l’unité de rétine médicale à l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin

Du côté du fond de l’œil

Autre facette de la révolution en cours en ophtalmologie 2.0 : l’avancée des innovations en ophtalmologie axées sur le fond de l’œil. Car les deux structures clés qui s’y cachent – la rétine et le nerf optique – sont longtemps restées éloignées des projecteurs. En cause : leur accès périlleux et leur extrême complexité.
« Jusqu’aux années 1980, on prenait surtout en charge les pathologies de la partie antérieure de l’œil (problèmes de cornée, strabisme, cataracte, etc.), mais très peu de spécialistes s’aventuraient vers la rétine, mis à part pour les cas de décollements traités avec les premiers lasers, rappelle le Prof. Wolfensberger. Et c’est justement l’arrivée de nouveaux lasers qui a métamorphosé la chirurgie rétinienne et a fait émerger le domaine de la rétine médicale. »
Recherche, industrie pharmaceutique et même carrière universitaire : l’ophtalmologie a alors changé de focale et s’est concentrée sur la partie postérieure de l’œil.

Perspectives de recherche infinies en ophtalmologie 2.0

Qu’en est-il aujourd’hui ? Les investigations se multiplient pour des pathologies rétiniennes aussi complexes que la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) ou la rétinopathie diabétique.
« La technologie avance à une vitesse spectaculaire et la prise de conscience de l’importance de la vision est globale, se réjouit la Prof. Chiara Eandi, médecin adjointe et coresponsable de l’unité de rétine médicale à l’Hôpital ophtalmique. Avec le vieillissement de la population, les problèmes de vue et les questions d’autonomie qui en découlent sont devenus un véritable enjeu de santé publique. »

Prof. Chiara Eandi
Prof. Chiara Eandi

médecin adjointe et coresponsable de l’unité de rétine médicale de l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin

Les perspectives de recherche sont donc infinies.
« Les parties de l’œil autres que la rétine pourraient elles-mêmes faire l’objet d’un engouement ravivé », prédit le Prof. Wolfensberger. Et de conclure : « Le domaine de la vision dépasse l’univers médical. Aux innovations en ophtalmologie actuelles et à venir peuvent s’associer les réflexions les plus vastes : que signifie vraiment voir ? Quels éléments modulent notre perception des objets, des couleurs, des visages qui nous entourent ? Qu’est-ce que « voir » quand notre vision est ou devient défaillante ? Ces questions sont aussi infinies que passionnantes. »

Zoom sur 5 projets phares et innovants en ophtalmologie 2.0

SEE (Swiss Eye Expertise)

Une plateforme sécurisée de télé-expertise alliant patients, soignants et chercheurs

Perspective : premières concrétisations courant 2021

Vaste projet initié par l’Hôpital ophtalmique et associant une multitude de partenaires académiques, scientifiques et techniques, la plateforme SEE repose sur un principe aussi simple sur le papier que complexe dans sa réalisation. son but, créer un lien informatique ultrasécurisé permettant aux ophtalmologues de transférer des images médicales en vue d’une expertise extérieure. Elle permet aux chercheurs de multiplier les données nécessaires au développement d’algorithmes d’intelligence artificielle. Les patients peuvent gérer à tout moment les droits d’utilisation de leurs données, même si celles-ci ont été anonymisées.
« Le défi est de taille, mais il répond à de multiples besoins actuels liés à la profusion et à la complexité des images médicales ainsi qu’aux pathologies et traitements qui y sont liés », résume Ciara Bergin, PhD, analyste scientifique et cheffe du projet à l’Hôpital ophtalmique.

Portrait de Dre Ciara Bergin
Cirara Bergin

PhD, analyste scientifique et cheffe du projet à l’Hôpital ophtalmique

IDx

Un programme de diagnostic automatisé pour le dépistage de la rétinopathie diabétique

Perspective : implanté depuis peu à l’Hôpital ophtalmique et dans son antenne

« Les diagnostics automatisés émanant de l’intelligence artificielle vont radicalement changer la façon de faire de la médecine, annonce le Prof. Thomas J. Wolfensberger, directeur médical de l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin. Nous commençons à le vivre avec le programme IDx. Il révolutionne le dépistage de la rétinopathie diabétique. »
Les forces en présence : une photo du fond de l’œil, un puissant algorithme et la détection quasi immédiate de troubles caractéristiques de la pathologie. Et ce n’est qu’à ce stade, si besoin donc, que le médecin entre en jeu.
« À terme, on peut imaginer un dépistage hors des murs d’un cabinet médical. Par exemple, en pharmacie, comme c’est aujourd’hui le cas pour la mesure de la pression artérielle, poursuit l’expert. Pour une pathologie comme la rétinopathie diabétique, dont le dépistage précoce est crucial, l’avancée est potentiellement prodigieuse. »

Photo opération œil bionique
C’est en 2014, grâce à un donateur privé, qu’est implanté le premier « œil bionique » de Suisse à l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin

Polyretina, un stimulateur de rétine nouvelle génération

Perspective: d’ici 3 ans

Destiné à des patients non-voyants atteints par exemple de rétinite pigmentaire, l’implant Polyretina, fruit d’une collaboration entre l’Hôpital ophtalmique et l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), permet de court-circuiter la rétine défaillante. Une mini-caméra fixée sur des lunettes capte l’image, la traduit en pixels et l’envoie vers l’implant inséré sur la rétine. Les pixels lumineux sont alors transformés, par l’implant, en un courant électrique. Celui-ci parvient à déclencher une sensation visuelle délivrée comme un message au nerf optique, puis au cerveau. Grâce à sa structure pliable innovante et à la puissance de ses capteurs, l’implant Polyretina permet potentiellement un champ visuel très élargi. Il permet aussi la lecture de lettres d’une vingtaine de centimètres de hauteur.

La thérapie génique pour contrer la dystrophie rétinienne

Perspective : imminente

Dans tous les domaines de la médecine, la thérapie génique suscite les plus vifs espoirs depuis une vingtaine d’années. Son principe : introduire par le biais d’un transporteur – on parle de « vecteur » – un gène parfaitement fonctionnel pour remplacer son homologue défaillant. Les obstacles sont multiples, mais l’ophtalmologie permet des interventions extrêmement ciblées, multipliant les chances que le précieux gène s’insère à la perfection sur le site en souffrance, sans risque de dispersion dans le reste du corps. Dans les éprouvettes de l’Hôpital ophtalmique : un projet de thérapie génique, élaboré avec une start-up suisse, visant à traiter des pathologies d’origine génétique comme la dystrophie rétinienne.

PDS

Un implant « médicament » pour traiter la DMLA

Perspective : d’ici 2 à 3 ans

Aujourd’hui, le traitement incontournable de la DMLA repose sur des injections intravitréennes (IVT) toutes les 4 à 12 semaines. Contraignantes et comportant un risque d’infection, ces injections pourraient bientôt être remplacées par des implants « médicaments » directement insérés dans l’humeur vitrée. Sortes de réservoirs miniatures, ils sont capables de délivrer progressivement le traitement, limitant considérablement la fréquence des interventions.

Illustration ADN et chercheuse

Deux fléaux en ligne de mire

Dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) et rétinopathie diabétique : si ces deux pathologies sont au cœur de nombreuses innovations en ophtalmologie, ce n’est pas un hasard. Dans les pays industrialisés, la DMLA n’est autre que la première cause de handicap visuel passé 50 ans et la rétinopathie diabétique, de cécité.

  • DMLA : Liée à la disparition de cellules de la rétine (forme « sèche ») ou à la prolifération anormale de vaisseaux sanguins (forme « humide »), la DMLA altère la partie centrale de la rétine, la macula. Au fil du temps, une tache noire s’y forme et la vision centrale se dégrade.
  • Rétinopathie diabétique : Affection liée au diabète, la rétinopathie diabétique résulte d’un dysfonctionnement des vaisseaux sanguins de la rétine. S’installant d’abord sans occasionner le moindre symptôme, elle nécessite un dépistage régulier. Non traitée, elle peut engendrer une baisse de vision, voire la cécité.

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L’article original a été modifié pour en faire une version web.

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