Mieux diagnostiquer les maladies du nerf optique
Zoom sur une étude prometteuse basée sur la perception des couleurs.
Un nouvel appareil permettant d’identifier un défaut de vision des couleurs est en cours d’évaluation par l’équipe de l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin. Le Dr Tim Beltraminelli, chef de clinique adjoint, dévoile les perspectives de ce projet de recherche.
Vous menez actuellement une étude sur la quantification de la vision des couleurs, avec la Prof. Aki Kawasaki, responsable du service de neuro-ophtalmologie de l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin. En quoi consistent vos travaux ?
Dr Tim Beltraminelli : Il s’agit d’un projet que nous avons commencé il y a quelques mois et pour lequel nous bénéficions d’un nouveau dispositif, AVOT (Advanced Vision and Optometric Tests), qui permet de visualiser et de mesurer avec précision un défaut de vision des couleurs. Notre étude est encore aujourd’hui dans une phase très précoce, mais nous sommes heureux et fiers de pouvoir la mener ici, à l’Hôpital ophtalmique, qui est pour l’instant, à notre connaissance, la seule structure en Suisse à disposer de cet outil. L’objet de notre travail consiste à évaluer dans quelle mesure nous pouvons parvenir à différencier trois types de maladies du nerf optique affectant la vision des couleurs : les maladies d’origine ischémique (liées à un défaut d’irrigation sanguine, ndlr), celles d’origine inflammatoire et celles génétiques et héréditaires.
Pourquoi est-il important d’identifier la maladie impliquée ?
Il existe de très nombreux types d’atteintes du nerf optique, qui ont un impact non seulement sur le champ visuel, mais aussi sur la vision des couleurs et l’acuité visuelle. Les maladies d’origine ischémique et inflammatoire sont les plus courantes et sont assez facilement identifiables avec les outils cliniques actuels et l’IRM. En revanche, les maladies génétiques ou héréditaires, beaucoup plus rares, sont plus difficiles à diagnostiquer. Les patientes et patients se trouvent souvent confrontés à une errance diagnostique avec de nombreux tests, examens et traitements avant que la cause de l’atteinte ne soit révélée. Parvenir à différencier ces maladies de façon précoce permettra d’apporter davantage d’éléments pour accélérer le diagnostic et mieux orienter les personnes vers la prise en charge adéquate.
Concrètement, comment utilisez-vous ce nouveau dispositif AVOT ?
Tout d’abord, face à un déficit de la vision des couleurs, nous procédons à un examen neuro-ophtalmologique clinique classique, avec fond de l’œil, scanner de la macula et du nerf optique, etc. Puis nous proposons à la personne concernée les tests habituels : le test Ishihara, qui s’intéresse surtout à la perception des teintes rouges et vertes grâce à des planches de pastilles colorées, et les tests analysant la capacité à trier les tonalités de couleurs (les tests Farnsworth-Munsell HUE à 28 ou 100 teintes). Après cette première étape, nous utilisons le nouveau dispositif AVOT, mis au point par un professeur londonien, John Barbur. Cet outil permet d’évaluer de façon quantitative la sévérité du déficit de la vision des couleurs. En cela, c’est une grande avancée diagnostique.
Cet outil sera-t-il un jour disponible à large échelle ?
Nous l’espérons ! Pour l’instant, le test AVOT n’est pas encore certifié comme dispositif médical autorisé et ne peut donc pas être utilisé dans les examens de routine. Mais cela sera probablement le cas à l’avenir. En attendant, nous avons beaucoup de chance de pouvoir l’utiliser pour faire avancer la recherche autour des maladies du nerf optique.
Nous avons modifié l’article original pour en faire une version web.